L’usufruitier qui dégrade manifestement l’immeuble peut être sanctionné par l’extinction absolue de l’usufruit.
Un homme est décédé le 5 août 2000, en laissant pour lui succéder ses enfants nés d’une première union et son épouse commune en biens, usufruitière, en vertu d’une donation notariée, de l’universalité des biens composant la succession, comprenant notamment un bien immeuble.
Un arrêt du 7 septembre 2005 a dit que l’épouse avait commis un recel successoral et de communauté sur la somme de 87 658 euros et sur un véhicule, ainsi qu’un recel successoral sur un autre véhicule, et a sursis à statuer sur les modalités de mise en oeuvre des sanctions du recel. Un arrêt du 7 juin 2006 a constaté que l’épouse ne pouvait prétendre à aucune part sur la somme de 87 658 euros et sur les véhicules recelés, a évalué ces véhicules, et a dit que le notaire devrait intégrer ces sommes avec intérêt au taux légal à compter du 5 août 2000 à la part des enfants dans la succession de leur père.
Les juges du fond ont fixé la valeur de l’immeuble à la somme de 133 000 euros et ont prononcé l’extinction de l’usufruit de l’épouse sur cet immeuble en application de l’article 618 du Code civil, au vu de « la perte de valeur de l’immeuble très dégradé et l’importance des travaux à réaliser ».
L’épouse forme un pourvoi en faisant valoir que « les photographies versées aux débats laissaient apparaître que la maison est tout à fait habitable et comporte notamment beaucoup de mobilier ».
Au visa de l’article 618 du Code civil, selon lequel « l’usufruit peut aussi cesser par l’abus que l’usufruitier fait de sa jouissance, soit en commettant des dégradations sur le fonds, soit en le laissant dépérir faute d’entretien (…) les juges peuvent, suivant la gravité des circonstances, ou prononcer l’extinction absolue de l’usufruit, ou n’ordonner la rentrée du propriétaire dans la jouissance de l’objet qui en est grevé, que sous la charge de payer annuellement à l’usufruitier, ou à ses ayants cause, une somme déterminée, jusqu’à l’instant où l’usufruit aurait dû cesser« , la Cour de cassation (22-15701) juge que « c’est par une appréciation souveraine que la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a retenu que la carence totale et ancienne de [l’épouse] dans l’exercice de son usufruit était à l’origine de la dégradation manifeste de l’immeuble imposant la réalisation de travaux lourds et onéreux avant toute entrée dans les lieux. Elle en a déduit que la gravité de la faute commise devait être sanctionnée par l’extinction absolue de l’usufruit. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision« .
Le moyen n’est donc pas fondé.
C.Cass.Civ.1ère, 02/10/2024, 22-15701 ;
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