Prescription biennale du Code de la consommation : la caution peut désormais s’en prévaloir.
JURISPRUDENCE :
Une banque a consenti à des emprunteurs un prêt immobilier garanti par le cautionnement d’une société caution. La banque a assigné les emprunteurs et la caution en paiement des sommes restant dues au titre du prêt.
Pour rejeter la demande de la banque en paiement formée contre la caution et ordonner à ses frais la mainlevée de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire, la cour d’appel « a constaté l’acquisition du délai biennal de prescription de l’action en paiement formée par la banque contre les emprunteurs et a relevé que la caution s’en prévalait pour s’opposer à la demande en paiement formée contre elle« .
Le créancier soutenait « qu’en ce qu’elle constitue une exception purement personnelle au débiteur principal, procédant de sa qualité de consommateur, la prescription biennale prévue à l’article L. 218-2 du code de la consommation ne peut être opposée au créancier par la caution ».
La Cour de cassation (20/04/2022, 20-22866), opérant un revirement de jurisprudence, va rejeter le pourvoi.
Elle rappelle tout d’abord :
– que l’article L. 218-2 du Code de la consommation dispose que l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ;
– que selon l’article 2253 du Code civil, les créanciers, ou toute autre personne ayant intérêt à ce que la prescription soit acquise, peuvent l’opposer ou l’invoquer lors même que le débiteur y renonce ;
– qu’il résulte de l’article 2313 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance N. 2021-1192 du 15/09/2021, que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette, mais ne peut lui opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.
Elle rappelle ensuite qu’il « a été jugé qu’en ce qu’elle constitue une exception purement personnelle au débiteur principal, procédant de sa qualité de consommateur auquel un professionnel a fourni un service, la prescription biennale prévue par l’article L. 218-2 du code de la consommation ne pouvait être opposée au créancier par la caution (C.Cass.Civ.1ère, 11/12/2019, 18-16147, voir le Diane-infos 24102).
Elle précise qu' »une telle solution exposait le débiteur principal au recours personnel de la caution, le privant ainsi du bénéfice de la prescription biennale attachée à sa qualité de consommateur contractant avec un professionnel fournisseur de biens ou de services, outre qu’elle conduirait à traiter plus sévèrement les cautions ayant souscrit leur engagement avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance précitée, laquelle permet en principe à la caution d’opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur« .
Elle juge donc qu’il y a « lieu de modifier la jurisprudence et de décider désormais que, si la prescription biennale de l’article L. 218-2 du code de la consommation procède de la qualité de consommateur, son acquisition affecte le droit du créancier, de sorte qu’il s’agit d’une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir, conformément aux dispositions précitées du code civil« .
Il en résulte que la demande en paiement formée par la banque contre la caution ne pouvait qu’être rejetée.
C.Cass.Civ.1ère, 20/04/2022, 20-22866 ;
courdecassation.fr – Voir le Diane-infos 25590



