Succession : le certificat successoral européen ne constitue pas un titre exécutoire.
JURISPRUDENCE :
Une personne est décédée en l’état d’un testament notarié dressé en Allemagne et désignant comme héritier son époux. Le service notarial des affaires successorales allemand a établi au profit de l’époux un certificat successoral européen (CSE) sur le fondement de l’article 67 du règlement (UE) N. 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 04/07/2012 relatif à la compétence, la loi applicable et l’exécution des actes authentiques en matière de succession et à la création d’un CSE.
L’époux a donc adressé à la banque une demande de règlement de la totalité des liquidités de la succession, accompagnée d’une copie du CSE. La banque ayant soumis la délivrance des fonds à la preuve de l’enregistrement du testament auprès de l’administration fiscale française par application de l’article 1000 du Code civil, l’époux l’a assignée en libération des fonds et en paiement de dommages-intérêts.
Les juges du fond rejettent la demande de l’époux en indiquant que le CSE a une efficacité probatoire mais ne constitue pas un titre exécutoire, de sorte que, s’il atteste de la qualité et des droits d’héritier, il n’épuise pas nécessairement les formalités à mettre en œuvre pour obtenir l’exécution de ces droits.
La Cour de cassation (20-23530), qui prend appui sur les dispositions suivantes du règlement précité :
– le considérant 10 du préambule pose que le « règlement ne devrait pas s’appliquer aux questions fiscales ni aux questions administratives relevant du droit public. Il appartient dès lors au droit national de déterminer, par exemple, comment sont calculés et payés les impôts et autres taxes, qu’il s’agisse d’impôts dus par la personne décédée au moment de son décès ou de tout type d’impôt lié à la succession dont doivent s’acquitter la succession ou les bénéficiaires. Il appartient également au droit national de déterminer si le transfert d’un bien successoral aux bénéficiaires en vertu du présent règlement ou l’inscription d’un bien successoral dans un registre peut, ou non, faire l’objet de paiement d’impôts » ;
– le considérant 71 ajoute que le CSE ne « devrait pas être, en tant que tel, un titre exécutoire mais devrait avoir une force probante et il devrait être présumé attester fidèlement de l’existence d’éléments qui ont été établis en vertu de la loi applicable à la succession ou en vertu de toute autre loi applicable à des éléments spécifiques, tels que la validité au fond des dispositions à cause de mort » ;
juge que la cour d’appel a justement retenu que, conformément au considérant 71 précité, « le certificat successoral européen avait une efficacité probatoire mais ne constituait pas un titre exécutoire, de sorte que, s’il attestait de la qualité et des droits d’héritier, il n’épuisait pas nécessairement les formalités à mettre en oeuvre pour obtenir l’exécution de ces droits« .
Elle approuve également les juges du fond d’avoir retenu, compte tenu des termes du considérant 10, que les dispositions des articles 1000 du Code civil et 655 du Code général des impôts prévoyant l’enregistrement des testaments faits en pays étrangers constituent une formalité fiscale donnant lieu au paiement d’un droit fixe.
Elle confirme enfin la position de la cour d’appel qui en a déduit que « l’exigence d’enregistrement de tout testament établi à l’étranger, qui ne remet (…) pas en cause l’efficacité probatoire du certificat successoral européen et ne constitu[e] pas une condition d’exécution des testaments prohibée par le Règlement, ne port[e] pas atteinte au principe d’application directe du règlement ni ne le priv[e] de son effet utile« .
C.Cass.Civ.1ère, 13/04/2022, 20-23530 ;
legifrance.gouv.fr – Voir Diane-infos 25662



