Indivision entre descendants portant sur la nue-propriété des biens de la succession de leur mère : chacun d’eux peut provoquer le partage, même en présence du conjoint survivant usufruitier.
Des époux mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts se sont consentis, le 17 décembre 1983, une donation au dernier vivant. Le 28 mai 2009, ils ont opté pour le régime de la communauté universelle, à l’exception des biens que l’article 1404 du Code civil déclare propres par leur nature et des biens immobiliers appartenant à l’épouse, avec attribution au conjoint survivant, à son choix, soit de la totalité en toute propriété des biens communs, soit de la moitié en pleine propriété et l’autre moitié en usufruit.
L’épouse est décédée le 19 juin 2016 en laissant pour lui succéder son époux et leurs deux enfants. L’époux a opté pour l’attribution de la propriété de l’ensemble des biens communs et pour l’usufruit de la totalité des biens de la succession de son épouse. Les 8 et 14 juin 2021, le fils a assigné son père et sa sœur aux fins de voir ordonner l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de la défunte ainsi que, le cas échéant, de la communauté, le rapport à la succession des donations consenties à ses héritiers et la réduction des libéralités excédant la quotité disponible. Le père et sa fille ont saisi le juge de la mise en état aux fins de voir déclarer l’action irrecevable en l’absence d’indivision successorale.
Pour déclarer irrecevable l’action introduite par le fils, les juges du fond retiennent, d’une part, que la totalité du patrimoine de la communauté a été transmise à l’époux au jour du décès de son épouse par l’effet de leurs conventions patrimoniales, les droits des enfants étant différés au décès du parent survivant, d’autre part, que l’époux ayant opté pour l’usufruit de la totalité des biens appartenant en propre à son épouse, en application de la donation du 17 décembre 1983, les enfants ont la qualité de nus-propriétaires des biens de la succession de leur mère de sorte que, un partage n’étant pas possible entre usufruitiers et nus-propriétaires, la demande d’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de la défunte, telle qu’elle est présentée par le fils, nu-propriétaire, est irrecevable, et, de dernière part, que les demandes de rapport des donations ne pouvant être ordonnées que lors d’une instance en liquidation et partage d’une succession, celles-ci sont tout autant irrecevables.
Au visa de l’article 815 du Code civil, dont il ressort que « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention« , la Cour de cassation (22-24672) juge qu' »en statuant ainsi, après avoir constaté l’existence d’une indivision successorale entre le [frère] et sa sœur portant sur la nue-propriété des biens dépendant de la succession de leur mère, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé« .
C.Cass.Civ.1ère, 15/01/2025, 22-24672 ;
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