Le concubinage ne constitue pas une cause de suspension de la prescription de créances entre indivisaires.
Un couple, qui vivait en concubinage, a acquis en indivision, le 25 juin 2002, un bien immobilier destiné au logement de la famille. Les concubins se sont séparés en août 2019. L’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l’indivision a été ordonnée judiciairement, le 6 mai 2021, un notaire étant désigné pour y procéder.
Le concubin a assigné son ancienne compagne en paiement des créances de conservation et d’apport du bien (soumises à la prescription quinquennale) nées avant 2016.
Pour déclarer prescrites les créances de conservation de l’immeuble indivis du concubin, les juges du fond ont énoncé que »la relation [des concubins], de par sa durée et sa réciprocité, n’emprunte pas les conditions d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité propres à la force majeure alors que la simple réticence à solliciter le remboursement des sommes exposées est insuffisante et que [le concubin] reconnaît que dès l’origine, [sa compagne] disposait de revenus bien moindres que les siens ne lui permettant pas de faire face au remboursement des emprunts, et donc encore moins d’un apport, et qu’il disposait alors des moyens de préserver ses droits lors de l’acquisition immobilière ».
Le concubin forme un pourvoi en soutenant qu' »aux termes de l’article 2234 du code civil, la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure ; que le concubin détenant une créance de conservation du bien dont il a la propriété indivise avec sa concubine est dans l’impossibilité d’agir en paiement à son encontre avant la rupture du concubinage, sauf à mettre en péril sa vie privée et familiale ».
Au visa de l’article 2234 du Code civil, dont il ressort que « la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure« , la Cour de cassation (24-10157) précise que « le concubinage ne peut, en soi, caractériser l’impossibilité dans laquelle serait une personne d’agir contre l’autre durant la vie commune, faute de remplir les conditions d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité de la force majeure« .
Ainsi, en « ayant relevé que [le concubin] reconnaissait que [sa compagne] disposait dès l’origine de la vie commune de revenus bien moindres que les siens, de sorte qu’il aurait été en mesure de préserver ses droits lors de l’acquisition immobilière, la cour d’appel a pu en déduire que sa simple réticence à solliciter auprès d’elle pendant le temps du concubinage le remboursement des sommes qu’il avait exposées pour le compte de l’indivision ne remplissait pas les conditions d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité de la force majeure permettant d’établir son impossibilité d’agir et d’interrompre la prescription avant l’expiration du délai« .
Par conséquent, « le moyen, qui ne fait état d’aucune incidence concrète de l’application des règles de prescription sur la vie privée et familiale [du concubin] en méconnaissance des exigences de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, n’est donc pas fondé« .
C.Cass.Civ.1ère, 24-10157, 10/09/2025 ;
courdecassation.fr