Bail commercial : le preneur peut se prévaloir d’une exception d’inexécution sans être tenu de délivrer une mise en demeure préalable.
Une société bailleresse a, pour une durée de vingt-trois mois, donné à bail un local à usage commercial, le contrat prévoyant le versement par le preneur d’une « indemnité de pas de porte » en cas de conclusion d’un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux. A l’issue du bail, la locataire est demeurée dans les lieux, sans signature d’un nouveau contrat ni versement de l’indemnité.
La locataire, qui a quitté les locaux en cours d’instance, a opposé une exception d’inexécution à la demande en paiement des loyers et formé, à titre reconventionnel, en cause d’appel une demande en paiement de dommages-intérêts pour manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance.
Pour condamner la locataire à payer à la bailleresse les loyers des mois de janvier à décembre 2016, la cour d’appel a retenu « qu’en l’absence de toute pièce démontrant qu’antérieurement au 18 août 2016, elle n’a pu exploiter son commerce, elle ne peut utilement se prévaloir d’une exception d’inexécution avant le 28 décembre 2016, date à laquelle elle a tiré les conséquences du refus de la bailleresse d’exécuter les travaux sollicités aux termes de sa mise en demeure du 1er novembre 2016, ayant informé la bailleresse de l’état du local et de l’impossibilité de l’exploiter ».
La locataire forme un pourvoi soutenant que « celui qui se prévaut de l’exception d’inexécution n’est pas tenu à une mise en demeure préalable »
La Cour de cassation (18/09/2025, 23-24005) précise qu’il résulte des articles 1184, alinéa 1er, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, 1719 et 1728 du Code civil « que le preneur peut se prévaloir d’une exception d’inexécution pour refuser, à compter du jour où les locaux sont, en raison du manquement du bailleur à ses obligations, impropres à l’usage auquel ils étaient destinés, d’exécuter son obligation de paiement des loyers sans être tenu de délivrer une mise en demeure préalable« .
Elle juge donc qu’en « statuant ainsi, en exigeant une mise en demeure, la cour d’appel, qui a ajouté à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas, a violé les textes susvisés« .
C.Cass.Civ.3ème, 18/09/2025, 23-24005 ;
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