Modification des droits attachés aux actions de préférence d’une SAS : le consentement individuel des titulaires de ces actions est requis si les statuts sont muets sur ce point.
Une société par actions simplifiée – SAS – a décidé la création d’actions de préférence « P » donnant droit, en application de l’article 8-1 de ses statuts, à un dividende prioritaire correspondant à 8 % du prix de souscription de ces actions ou à 50 % du bénéfice net consolidé par action.
Par la suite, l’assemblée générale extraordinaire de la SAS a, d’une part, réduit le montant du dividende prioritaire attaché aux actions de préférence « P » à 3 % du prix de souscription ou 15 % du bénéfice net consolidé par action, d’autre part, modifié en conséquence l’article 8-1 des statuts.
Des associés porteurs d’actions de préférence ont assignés la société en nullité des résolutions de cette assemblée générale et en paiement de sommes à titre de complément de dividendes.
Pour rejeter ces demandes, la cour d’appel énonce « qu’aucune disposition légale n’exige que le consentement des associés à la modification de leurs droits particuliers attachés à certaines actions soit recueilli individuellement ».
La Cour de cassation (10/07/2024, 22-15836) précise qu’il résulte de l’article 1134 du Code civil, (ancien) que, « lorsque les statuts d’une société par actions simplifiée ne prévoient pas les modalités selon lesquelles les droits attachés aux actions de préférence peuvent être modifiés, le consentement individuel des titulaires de ces actions est requis pour procéder à une telle modification« .
Elle juge donc qu’en « statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé« .
Les associés requérants soutenaient également que, selon l’article L. 228-15, alinéa 2, du Code de commerce, « la modification des droits particuliers attachés aux actions d’une catégorie s’analysant en une conversion de ces actions en actions d’une autre catégorie, les titulaires des actions à convertir ne peuvent, à peine de nullité de la délibération, prendre part au vote sur la modification des droits particuliers attachés à leurs actions qui emporte création subséquente d’une autre catégorie d’actions ».
Or, en l’espèce, des porteurs d’actions de préférence ont participé au vote sur la réduction du montant du dividende prioritaire.
Pour juger que les dispositions de l’article L. 228-15, alinéa 2, du Code de commerce ne sont pas applicables en l’espèce, la cour d’appel a retenue que le vote soumis aux associés de la société ne portait pas sur la création d’une action de préférence, mais sur la modification à la baisse des modalités de rémunération d’actions de préférence déjà existantes.
La Cour de cassation rappelle que selon ce texte, « les titulaires d’actions devant être converties en actions de préférence de la catégorie à créer ne peuvent, à peine de nullité de la délibération, prendre part au vote sur la création de cette catégorie« .
Elle précise que « constitue une conversion d’actions au sens et pour l’application de ce texte toute opération emportant modification des droits attachés aux actions converties« .
Elle juge qu’en « statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que la modification des droits attachés aux actions de préférence « P » de la société, laquelle entraînait un changement de catégorie de ces actions, constituait une conversion d’actions au sens et pour l’application de l’article L. 228-15, alinéa 2, du code de commerce, quand bien même ces actions continuaient d’être désignées sous le même intitulé, ce dont elle aurait dû déduire que les associés titulaires d’actions de préférence « P » n’auraient pas dû prendre part au vote portant sur la modification du dividende prioritaire attaché à ces actions et que, par suite, les résolutions litigieuses étaient entachées de nullité, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé« .
C.Cass.Com., 10/07/2024, 22-15836 ;
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