Limitation de l’engrillagement des propriétés en zone naturelle : l’arrêté relatif à la déclaration préalable ne peut déroger à la réglementation sur la chasse.
La loi N. 2023-54 du 02/02/2023 visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée (Diane-infos 26374) réglemente les clôtures implantées dans les zones naturelles ou forestières. Elle encadre davantage la pratique de la chasse à l’enclos et favorise la continuité écologique.
L’arrêté du 08/04/2024 (Diane-infos 27517) est venu préciser les modalités de la déclaration préalable à l’effacement de clôtures en application de l’article L. 424-3-1 du Code de l’environnement, créé par la loi précitée. Des requérants ont saisi le Conseil d’Etat d’une demande d’annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté.
Pour rappel, l’article L. 424-3-1 du Code de l’environnement, dispose que :
« I.-Tout propriétaire d’un enclos prenant la décision d’en supprimer la clôture ou se conformant à l’article L. 372-1 procède à l’effacement de celle-ci dans des conditions qui ne portent atteinte ni à l’état sanitaire, ni aux équilibres écologiques, ni aux activités agricoles du territoire.
II.-Dans le cas où une des atteintes mentionnées au I du présent article résulte de l’effacement d’une clôture, celui-ci est soumis à déclaration préalable auprès du représentant de l’Etat dans le département où l’enclos est situé.
III.-Les modalités de déclaration préalable prévoient notamment d’informer l’administration des mesures qui sont prises préalablement à l’effacement de la clôture en vue de la régulation des populations de grand gibier contenues dans l’enclos.
Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture détermine ces modalités de déclaration préalable« .
L’article L. 372-1 du même code (dans sa rédaction issue de la loi du 2 février 2023) précise quant à lui les règles que doivent désormais respecter les clôtures implantées dans les zones naturelles ou forestières délimitées par le règlement du plan local d’urbanisme en application de l’article L. 151-9 du Code de l’urbanisme ou, à défaut d’un tel règlement, dans les espaces naturels. Cet article prévoit que les clôtures doivent permettent en tout temps la libre circulation des animaux sauvages et également une série d’exceptions à ces règles.
Le Conseil d’État (18/07/2025, Req. 493887) relève que le second alinéa de l’article 1er de l’arrêté attaqué « impose une déclaration préalable avant l’effacement de la clôture ou sa mise en conformité au sens de l’article L 372-1 du code de l’environnement en cas de présence dans l’espace clos de sangliers, cerfs élaphes et chevreuils à des densités supérieures à celles indiquées à l’article 4, ainsi qu’en cas de présence dans cet enclos d’espèces non indigènes notamment de grands ongulés (daim, mouflon, chamois, isard) ou d’espèces exotiques envahissantes listées aux annexes I et II de l’arrêté du 14 février 2018 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces animales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain. L’article 4 de cet arrêté, auquel renvoie donc le second alinéa de l’article 1er, prévoit que si la densité estimée des populations à l’intérieur de l’espace clos est supérieure à 5 sangliers/100 ha ou 2 cerfs élaphes/100 ha ou 6 chevreuils/100 ha, le propriétaire procède ou fait procéder, au moins deux mois en amont de l’effacement de ses clôtures, à des actions de régulation, par la chasse ou par destruction selon la période de l’année, visant à abaisser la densité moyenne aux 100 hectares à un niveau inférieur ou égal à cette valeur seuil. Pour les autres espèces, l’article 4 prévoit que les actions de régulation par la chasse ou par destruction, voire par capture autorisée, doivent viser au retrait de tout individu. Le h) de l’article 3 prévoit que la déclaration préalable doit comprendre la proposition de gestion conduisant à une densité d’animaux inférieure ou égale aux valeurs seuils mentionnées à l’article 4« .
Il note cependant que l’article L. 424-3-1 du Code de l’environnement, « qui se borne, en ses II et III, à prévoir qu’un arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture détermine les modalités de déclaration préalable à l’effacement des clôtures si cet effacement porte atteinte à l’état sanitaire, aux équilibres écologiques, ou aux activités agricoles du territoire, n’a pas pour objet d’autoriser le pouvoir réglementaire à fixer des règles relatives à la régulation, notamment par la chasse, des espèces sur le territoire national, par dérogation à la réglementation sur la chasse« .
Il juge donc que, dès lors, « l’article 4 de l’arrêté attaqué est entaché d’incompétence. Il s’ensuit qu’il y a lieu d’annuler l’article 4, ensemble le second alinéa de l’article 1er et le h) de l’article 3 qui n’en sont pas divisibles« .
CE, 18/07/2025, Req. 493887 ; legifrance.gouv.fr



