Clause subrogeant l’acquéreur dans les droits et obligations du vendeur et action du locataire en répétition de paiements indus.
En juin 2011, une société propriétaire de locaux commerciaux et donnés à bail, a délivré un commandement de payer à la locataire visant la clause résolutoire insérée au bail au titre, notamment, des charges appelées par le syndicat des copropriétaires. La locataire a acquitté les sommes visées au commandement en précisant qu’il s’agissait d’un règlement à titre conservatoire pour éviter la résiliation du bail.
En décembre 2011, les locaux ont été vendus à une autre société. L’acte de vente prévoyait que l’acquéreur fera son affaire personnelle, d’une part, de la continuation ou de la résiliation des baux dont les biens sont l’objet ainsi que de toutes les procédures qui pourraient survenir à compter de l’entrée en jouissance sans recours contre le vendeur, aux droits et obligations duquel il sera purement et simplement subrogé, d’autre part, de tout contentieux qui se déclarerait à compter du transfert de propriété, même si la cause en était directement ou indirectement antérieure.
En 2015, la locataire a assigné la société cédante en annulation du commandement de payer et en restitution des sommes à elle indûment payées. Cette société a appelé en la cause la société cessionnaire.
Pour mettre hors de cause la société cédante, la cour d’appel retient “qu’il importe peu que celle-ci ait perçu les fonds dont la restitution est demandée par la locataire, dès lors que l’acte de vente des locaux loués stipulait une clause de subrogation de l’acquéreur dans les droits et obligations du vendeur pour tout contentieux qui se déclarerait à compter du transfert de propriété même si la cause en était directement ou indirectement antérieure et qu’au jour de la délivrance de l’assignation par la locataire, c’est la société cessionnaire qui avait seule la qualité de bailleresse”.
La Cour de cassation (16/05/2024, 22-19922) rappelle tout d’abord :
– que selon l’article 1165 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance N. 2016-131, “les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes et ne nuisent point aux tiers” ;
– qu’en application de l’article 1743, alinéa 1er, du Code civil, “le bail est opposable à l’acquéreur qui en a eu connaissance avant la vente de la chose louée” ;
– qu’aux termes de l’article 1376 ancien du Code civil, “celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s’oblige à le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu“.
Elle précise ensuite qu’il “résulte de la combinaison de ces textes que le locataire peut agir à l’encontre de son bailleur originaire en restitution de paiements indus effectués au titre de loyers et charges échus antérieurement à la vente, sans que celui-ci, qui reste tenu à son égard de ses obligations personnelles antérieures à la vente, ne puisse lui opposer une clause contenue dans l’acte de vente subrogeant l’acquéreur dans les droits et obligations du vendeur“.
Elle juge donc qu’en “statuant ainsi, alors que la locataire avait versé les sommes prétendument indues au titre de charges locatives à la société [cédante] antérieurement à la vente, la cour d’appel a violé les textes susvisés“.
C.Cass.Civ.3ème, 16/05/2024, 22-19922 ;
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