Conditions du remboursement du client par sa banque en cas d’escroquerie bancaire.
This content has been archived. It may no longer be relevant
Dans deux décisions du 15/01/2025, la chambre commerciale de la Cour de cassation a apporté des précisions quant aux conditions du remboursement du client par sa banque en cas d’escroquerie bancaire.
Elle a précisé que si les banques doivent rembourser leurs clients victimes d’escroquerie bancaire, toutefois, elles ne sont pas tenues d’effectuer ce remboursement, même partiel :
– s’il y a eu une négligence grave de leur client ;
– en cas de virement effectué sur la base d’un identifiant bancaire fourni par leur client, mais qui ne vise pas le bon bénéficiaire.
Dans la première affaire (23-13579, Diane-infos 28261-A), deux sociétés, victimes d’une escroquerie bancaire, ont saisi la justice afin d’obtenir de leur banque un remboursement intégral.
La cour d’appel a considéré que les torts étaient partagés après avoir relevé :
– une négligence grave des deux sociétés (le courriel malveillant paraissait manifestement trompeur, rédigé en langue anglaise sans raison) ;
– un manquement de la banque à son obligation de vigilance (elle n’a tenu compte ni des alertes d’un organisme de surveillance des attaques informatiques, ni de nombreuses tentatives de connexion le jour des faits).
La banque a été condamnée à rembourser 50 % des pertes subies par les deux sociétés.
La Cour de cassation rappelle que selon le Code monétaire et financier – CMF – une banque a l’obligation de rembourser ses clients victimes d’escroquerie (article L. 133-18), mais, si le client a commis une négligence grave qui l’a conduit à se faire escroquer, l’obligation de remboursement qui pèse sur la banque est levée (article L. 133-19). Dans ce contexte, la Cour de cassation juge que la négligence grave du client libère la banque de tout partage de responsabilité.
En l’espèce, même si la banque a manqué à son obligation de vigilance, son client a commis une négligence grave qui a rendu possible l’escroquerie : il a tenu compte d’un courriel manifestement frauduleux. Dès lors, il ne peut y avoir remboursement, même partiel, du client par la banque. La décision de la cour d’appel est donc censurée.
Dans la seconde affaire (23-15437, Diane-infos 28261-B), un couple, pour acquérir un véhicule sur internet, a effectué deux virements bancaires, en se basant sur l’IBAN qui lui avait été transmis par courriel (un premier virement, à distance et un second, en se déplaçant à la banque, ordonné au guichet).
Le vendeur a signalé au couple qu’il n’avait reçu aucun des deux virements. Le couple s’est rendu compte qu’au cours de leurs échanges par courriel avec le vendeur, ils avaient été victimes d’un piratage informatique : dans l’un de ces courriels, un escroc était parvenu à substituer son propre IBAN à celui du vendeur, récupérant ainsi l’argent de la vente.
La banque a refusé de rembourser le couple.
La cour d’appel a rappelé que le CMF prévoit qu’une banque ne peut voir sa responsabilité engagée lorsque son client lui fournit un mauvais IBAN mais elle a considéré que la banque restait tenue à une obligation de vigilance ; en effet, l’IBAN transmis par courriel présentait des anomalies apparentes.
La cour d’appel a condamné la banque à rembourser une partie des sommes versées par le couple.
La Cour de cassation précise que selon le CMF, une banque qui exécute un virement en se basant sur un identifiant (RIB/IBAN) fourni par son client ne peut être tenue responsable de l’opération de paiement lorsque l’identifiant n’oriente pas le transfert de fonds vers le bénéficiaire souhaité (article L. 133-21).
La Cour de cassation juge en conséquence que ces dispositions excluent tout partage de responsabilité entre la banque et son client.
Dans cette affaire, l’origine de l’IBAN dont disposait le client (un piratage informatique), comme le fait que la banque n’ait pas relevé les anomalies que laissait apparaître l’identifiant, ne sont pas des circonstances envisagées par le CMF comme ouvrant la possibilité d’un partage de responsabilité. Dès lors, il ne peut y avoir remboursement, même partiel, du client par la banque.