Méthode d’évaluation d’un usufruit temporaire de parts sociales.
JURISPRUDENCE :
Dans sa décision du 30/09/2019 (Req. 419855, voir notamment les Diane-infos 23980 et 23441), le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la valorisation d’un usufruit temporaire de parts sociales de société civile, et plus particulièrement sur une méthode d’évaluation de cet usufruit temporaire sur les revenus futurs :
“En cas de démembrement de droits sociaux, l’usufruitier, conformément à l’article 582 du code civil qui lui accorde la jouissance de toute espèce de fruits, n’a droit qu’aux dividendes. L’évaluation du revenu futur attendu par un usufruitier de parts sociales ne peut avoir pour objet que de déterminer le montant des distributions prévisionnelles qui peut être fonction notamment des annuités prévisionnelles de remboursement d’emprunts ou des éventuelles mises en réserves pour le financement d’investissements futurs, lorsqu’elles sont justifiées par la société“.
Dans sa décision du 20/05/2022 (Req. 449385), après avoir rappelé sa jurisprudence, il précise “qu’en l’absence d’argumentation des contribuables tirée de ce que le montant des distributions prévisionnelles tel que déterminé par le vérificateur serait surévalué en tant qu’il ne prendrait pas en compte certains éléments susceptibles de l’affecter qu’ils étaient seuls en mesure de justifier, notamment le solde de la trésorerie disponible, et alors que, depuis sa création, la totalité des bénéfices de la société est distribuée et appréhendée par les associés, par perception de numéraire ou inscription au crédit des comptes courants d’associés, le juge ne méconnaît pas son office en s’abstenant de rechercher si la méthode mise en œuvre par l’administration a tenu compte de tels éléments“.
En l’espèce, concernant la méthode d’évaluation mise en œuvre par le vérificateur, celui-ci a déterminé “la valeur attendue de l’usufruit des parts de la [société] en effectuant la moyenne arithmétique des valeurs obtenues à l’aide, d’une part, de la méthode de la valeur actualisée des flux de revenus futurs, en capitalisant le montant du dividende moyen distribué les trois années précédant la cession en litige, à partir d’un taux de rendement et d’un taux de croissance des dividendes sur la durée de l’usufruit, et d’autre part de la méthode de la valeur en pleine propriété des titres, l’usufruit étant déterminé à partir du taux de rendement des titres sur la durée de l’usufruit. La cour a relevé que la valeur de l’usufruit des titres en litige ainsi obtenue était supérieure de 69 % à la valeur déclarée par les contribuables s’agissant des titres démembrés durant une période de dix ans et de 114 % pour ceux portant sur une durée de dix-sept ans” ;
Concernant la méthode alternative d’évaluation de l’usufruit proposée par la société requérante “fondée sur le solde actualisé de la trésorerie disponible correspondant à la différence entre l’excédent brut d’exploitation et le besoin en fonds de roulement, les annuités d’autofinancement des investissements et la rémunération des associés, sans justifier des motifs pour lesquels elle entendait modifier pour l’avenir sa pratique antérieure constante de distribution de la totalité de ses bénéfices comptables”, la cour administrative d’appel “a jugé que cette méthode se bornait à déterminer l’endettement financier de la SCEV et sa trésorerie disponible et ne permettait pas, par suite, de déterminer le montant des distributions prévisionnelles attendu par l’usufruitier”. Le Conseil d’Etat juge “qu’en statuant ainsi, et alors au demeurant que le ministre fait valoir que la méthode alternative proposée aboutissait, sur les quatre années antérieures, à retenir un montant de trésorerie disponible nettement inférieur au montant effectivement distribué au titre de ces mêmes années, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ni dénaturé les faits”.
CE, 20/05/2022 , Req. 449385 ;
legifrance.gouv.fr – Voir Diane-infos 25867