Les dispositions permettant d’obtenir du préfet l’évacuation forcée de l’occupant irrégulier d’un domicile sont conformes à la Constitution.

This content has been archived. It may no longer be relevant

Le Conseil constitutionnel a été amené à se prononcer sur la conformité des dispositions prévues à l’article 38 de la loi N. 2007-290 du 05/03/2007, dans sa rédaction résultant de la loi N. 2020-1525 du 07/12/2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP – Diane-infos 24214).

Aux termes de ces dispositions, la personne dont le domicile est occupé de manière illicite, qu’il s’agisse ou non de sa résidence principale, peut, sous certaines conditions, demander au préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux. En cas de refus de ce dernier, le préfet doit procéder sans délai à l’évacuation forcée du logement.

Il était reproché à ces dispositions d’instituer une procédure administrative permettant l’expulsion de l’occupant d’un logement sans prévoir d’examen contradictoire de sa situation personnelle et familiale, ni de recours suspensif garantissant qu’un juge se prononce avant qu’il soit procédé à son évacuation forcée. Selon la requérante, il en résulterait une méconnaissance du droit au recours juridictionnel effectif ainsi que du droit au respect de la vie privée et du droit à l’inviolabilité du domicile. La requérante critique par ailleurs la différence de traitement injustifiée entre les occupants d’un logement selon qu’ils font l’objet de la procédure d’expulsion prévue par ces dispositions ou de la procédure d’expulsion juridictionnelle de droit commun.

Dans sa réponse, le Conseil constitutionnel (N. 2023-1038, 24/03/2023) souligne qu’”en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu assurer l’évacuation à bref délai des domiciles illicitement occupés. Ce faisant, il a cherché à protéger le principe de l’inviolabilité du domicile, le droit au respect de la vie privée et le droit de propriété des occupants réguliers“.

Par ailleurs, “la mise en demeure ne peut être demandée au préfet qu’en cas d’introduction et de maintien à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou de contrainte dans un domicile. D’autre part, elle ne peut être mise en œuvre qu’après que le demandeur a déposé plainte, fait la preuve que le logement constitue son domicile, et fait constater par un officier de police judiciaire cette occupation illicite. Dès lors, le préfet ne peut mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux que dans le cas où il est constaté que ce dernier s’est introduit et maintenu dans le domicile en usant lui-même de manœuvres, menaces, voies de fait ou de contrainte“.

Les dispositions attaquées prévoient également que “le préfet peut ne pas engager de mise en demeure dans le cas où existe, pour cela, un motif impérieux d’intérêt général. Toutefois, selon les Sages, elles ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et au principe de l’inviolabilité du domicile, être interprétées comme autorisant le préfet à procéder à la mise en demeure sans prendre en compte la situation personnelle ou familiale de l’occupant dont l’évacuation est demandée.

Le Conseil constitutionnel rappelle également que “le délai laissé à l’occupant pour déférer à la mise en demeure de quitter les lieux ne peut être inférieur à vingt-quatre heures“.

Enfin, il indique que “les dispositions contestées ne privent pas l’occupant de la possibilité d’introduire un référé sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative ou d’exercer un recours contre la mise en demeure devant le juge administratif qui, sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 521-2 du même code, peut suspendre l’exécution de la mise en demeure ou ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale. D’autre part, le caractère non suspensif d’une voie de recours ne méconnaît pas, en lui-même, le droit à un recours juridictionnel effectif. En outre, en cas d’illégalité de la décision administrative d’évacuation forcée de l’occupant, ce dernier peut exercer un recours indemnitaire devant le juge administratif“.

Il résulte de ce qui précède que, “compte tenu des garanties mentionnées précédemment et sous la réserve énoncée au paragraphe 12, les dispositions contestées ne peuvent pas être regardées comme méconnaissant le droit au respect de la vie privée ou le principe de l’inviolabilité du domicile. Elles ne méconnaissent pas non plus le droit à un recours juridictionnel effectif.

Par conséquent, les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le principe d’égalité, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent, sous la même réserve, être déclarées conformes à la Constitution“.

Vous pouvez consulter le communiqué de presse de cette décision en cliquant ici.

Conseil Constitutionnel, QPC N. 2023-1038, 24/03/2023 ;
conseil-constitutionnel.fr

     Voir le Diane infos

Print Friendly, PDF & Email
0 votes

Laisser un commentaire

DIANE-INTRANOT

GRATUIT
VOIR